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Commémoration de l’assassinat du résistantAbdoul Bocar Kane

Commémoration de l’assassinat du résistantAbdoul Bocar Kane

En ce jour de commémoration, nous nous souvenons et rendons hommage à un véritable héros de la résistance contre la colonisation française en Afrique, Abdoul Bocar Kane, dont le courage, le nationalisme et le dévouement sont sources d’inspiration pour toute la jeunesse africaine. Ce 4 Août la communauté du Fouta et nationale commémore la mort du héros national Abdoul Bocar Kane assassiné le 4 août 1891. Après plus de 30 ans de résistance contre la pénétration coloniale dans son fief natal. Ce jour du 4 Août signera un jour noir pour l’indépendance et la sauvegarde de notre souveraineté pour lesquelles Abdoul Bocar s’est battu avec force et conviction. Abdoul Bocar restera une source d’inspiration pour les jeunes générations actuelles et futures pour un idéal d’indépendance et d’autodétermination dans le respect de nos identités culturelles, religieuses et de notre authenticité de foutanké. Ce héros s’est battu pour le respect de son peuple et le droit pour celui-ci de disposer de son territoire et d’en décider le devenir de ses richesses. Lui qui est petit-fils de Ali Doundou Séguélé un des héros de la mise en place de la République Théocratique du Fouta a porté haut l’idéal de justice à travers les principes islamiques et la tradition morale musulmane et africaine. Avec lui disparut l’un des éléments les plus dynamiques de la première génération de nationalistes opposés à la conquête coloniale française du Fuuta Tooro. La grande singularité de Abdoul Bocar Kane fut son nationalisme exclusif qui ne lui avait pas permis de se projeter dans un champ de lutte anticoloniale autre que celui de son Fuuta Tooro natal* (par Ibrahima Abou Sall). Abdoul Bocar fit face aux défis de son temps avec une bravoure inébranlable. Son sacrifice et son engagement envers le devoir ont été au-delà de l’appel du devoir. Étudier et donner en exemple, au Sénégal et en Afrique la vie et l’œuvre de Abdoul Bocar, donnera un beau socle d’apprentissage de la valeur de la souveraineté et de la dignité des peuples africains à travers ce qui a été son combat militaire, politique et diplomatique. Son accueil du Bourba Djoloff, en la personne de Alboury Ndiaye est l’un des premiers actes de diplomatie panafricaine de l’histoire coloniale de la sous-région. Que sa lumière continue de guider notre chemin vers une Afrique de paix et d’unité. Que la mémoire de Abdoul Bocar Vive ! Par le comité scientifique des journées de Abdoul Bocar Kane.

La prouesse d’Abdoul Bokar Kane

La prouesse d’Abdoul Bokar Kane

Dans les ouvrages récents consacrés aux États africains et à leurs dirigeants de la fin du 19ème siècle, Abdoul Bokar Kane est rarement mentionné. En tant que Toucouleur, il ne relève pas du champ de recherche privilégié par les universitaires sénégalais et centré sur les Wolofs et la société côtière. En tant que « simple chef », il n’attire pas autant que les réformateurs tels qu’Oumar ou les rois comme Lat Dior et Albury Ndiaye . Il arriva « après Faidherbe » et par conséquent après la période que l’historiographie coloniale française avait qualifiée, non sans certaines raisons, d’origine du « Sénégal moderne ». Il ne laissa pas derrière lui un héritage institutionnel et les chefs nommés par Dodds à sa place contribuèrent à minimiser l’influence de sa famille dans le Fouta Toro colonial. L’oubli n’a pas été total. Dans l’historiographie plus locale du Sénégal, sous l’influence d’auteurs tels que Faidherbe et des familles toucouleurs qui prospérèrent sous la domination française, deux images d’Abdoul apparaissent. Il était le « chef de bande » qui assassinait des marabouts, et un adversaire impénitent de la « pénétration française ». Si l’on s’en tient aux années 1862-1864, 1881-1885 et 1890-1891, on pourrait être tenté d’en arriver à cette conclusion. La réalité, cependant, était bien plus riche et plus complexe. À l’instar d’Oumar, de Lat Dior et d’Albury, Abdoul changea sa stratégie politique pour s’adapter à des circonstances, des possibilités et des objectifs en constante évolution. Comme le souligne Hargreaves dans un contexte plus large : Quasiment tous les États d’Afrique de l’Ouest ont tenté de trouver une base sur laquelle coexister avec les Européens. Tous pratiquement semblent avoir eu des formes d’intérêts qu’ils cherchèrent à protéger en résistant ou en se révoltant – une conception de ce qui ne peut être décrit que comme une « cause nationale » rudimentaire… Analyser la « cause nationale » de tout peuple spécifique nécessite de prendre en considération certaines valeurs profondément enracinées dans leur propre culture et qui ne sont pas immédiatement accessibles aux étrangers, ainsi que certaines autres pouvant être universellement comprises – les revendications territoriales, la liberté de régler des questions d’intérêt local sans ingérence étrangère. C’est sur cette base qu’ils tentaient de résoudre la question des rapports avec les étrangers. Le fait de juger nécessaire de défendre la cause nationale sur le champ de bataille, et à quel moment, dépendait de facteurs propres à l’un et l’autre des acteurs de la relation afro-européenne – l’habileté politique africaine d’un côté et les intentions européennes de l’autre . Comme un grand nombre de dirigeants importants, Abdoul jouissait d’une certaine dose de chance. Son grand-père Ali Doundou avait tracé en partie la voie qu’il empruntait et son père le forma aux arts de la diplomatie et de la guerre. Son environnement familial Foulbé lui garantissait de pouvoir s’affranchir des institutions du régime toorodBe et d’accéder facilement à l’appui politique de guerriers. L’exode oumarien écarta un grand nombre de rivaux en puissance, dans sa propre famille et dans d’autres, et fragilisa l’assise des anciennes formes d’autorité. Les Français commencèrent à détourner leur attention du Fouta Toro au moment où Abdoul y trouvait sa place ; au moment où ils revinrent en force, il avait établi son réseau de soutien et sa réputation en tant que guerrier féroce et fin négociateur. Toutefois, comme tout « homme éminent de son siècle », Abdoul créait ses propres brèches et percevait les possibilités et les limites des situations auxquelles il était confronté. Il apprenait de ses erreurs et profitait de celles des autres. Avec Oumar, il évita soigneusement une confrontation ouverte, mais désobéit à la moindre occasion aux instructions du Sheku et finit par voler son bétail, apparaissant dans les années 1850 comme le seul dirigeant du Fouta au prestige rehaussé. En 1862-1863, il se joignit à un Almamy recommandé par Oumar et acquit une réputation de militant contre l’intrusion française. Il se rendit vite compte de la futilité d’un conflit ouvert avec les Européens et les troupes formées par les Européens, et commença à attaquer leurs flancs comme il l’avait fait avec Oumar. En effectuant des replis stratégiques, il survécut à chacune des attaques frontales françaises contre le Bosseya en 1864, 1881 et 1883. À chaque fois, il en ressortit plus fort, mit dans l’embarras des adversaires tels que Mamadou Biran et Ibra Almamy, et obtint de Saint-Louis la reconnaissance de son autonomie et de sa prééminence dans le Fouta. Son opposition aux menaces ne se faisait pas de manière aveugle et il était prêt à conclure un accord une fois telle ou telle menace disparue. Au cours de la crise du télégraphe, il fit clairement entendre ses conditions depuis le début et resta en contact avec les Français. Il était prêt à offrir l’amnistie à Thierno Brahim ; il proposa à Ibra Almamy une position subordonnée, mais importante après la bataille de 1876. Abdoul fit face à trois types de dangers : celui posé par les chefs toorodBe, en particulier la coalition des Wane ; celui posé par les réformateurs, et plus précisément Thierno Brahim et les MadiyankooBe, ainsi que le pouvoir permanent d’attraction du « Nioro » ; et celui posé par les Français, qui représentèrent une menace pendant quasiment toute la période où Faidherbe fut gouverneur et durant les années 1880, mais qui étaient soumis aux fluctuations saisonnières du fleuve et aux rigueurs du climat. Son objectif, qu’il atteignait en règle générale, était d’empêcher plus d’une menace de se matérialiser en même temps. Abdoul atteignit le point le plus bas de sa carrière en 1870-1873, précisément lorsque les chefs et les réformateurs se mobilisèrent contre lui et alors que les Français étaient trop faibles et peu intéressés à l’aider. La coalition des Wane, soutenue par les MadiyankooBe, retarda le retour d’Abdoul dans le Fouta, l’exclut temporairement des délibérations du conseil électoral, et l’obligea à fortifier son propre compound. Mais le Bosséyaajo rebondit rapidement, tira parti des erreurs de ses adversaires et évita soigneusement de répéter les