Comment Abdoul Bocar Ali Dundu Segele a eu la main de la Princesse du Bundu, Djiba Hamady Saada.
Dans une des histoires racontées plus haut, notre narrateur nous avait dit comment les différents chefs de province se retrouvaient chaque année pour discuter des intérêts de leurs contrées, s’informer mutuellement et harmoniser leurs actions. Tout comme le G20 aujourd’hui, ou le G7, etc…On se demandait même si les occidentaux n’avaient pas triché sur nous autres.
Au moment de ces rencontres, il y avait non seulement des rencontres politiques, mais aussi des activités culturelles et sportives. Parmi elles, une course de chevaux était organisée pour déterminer qui était le meilleur cavalier et chaque fois c’est Bocar Hamdjatou Mody Mbaye, un maabo (caste des tisserands) et valeureux guerrier de Abdoul Bocar Kane qui gagnait.
Cette année la rencontre s’est tenue chez Alboury Ndiaye à Yang Yang. Encore une fois, Bocar Hamdjatou fut le meilleur. Le roi du Bundu Almamy Hamady Saada l’admirait beaucoup. Il fit part à Abdoul Bocar de son admiration pour son compagnon et lui demanda la permission de l’inviter au Bundu. Abdoul Bocar accepta de grand cœur et libéra son maabo attitré pour une durée d’un mois de séjour au Bundu auprès d’Almamy Hamady Saada.
Bocar Hamdjatou prit le chemin du Bundu, il fut accueilli à bras ouverts par Almamy Hamady Saada. Après quelques jours de repos, Almamy Hamady Saada lui demanda de l’accompagner dans quelques villes du Bundu. Partout où ils allaient, Almamy Hamady Saada se faisait un plaisir de présenter Bocar Hamdjatou, et d’organiser une course hippique que Bocar Hamjatou gagnait à tous les coups. Ils se promenèrent ainsi dans tout le Bundu. Au bout du mois, Bocar Hamdjatou demanda « la route » à son hôte, lui disant que le temps accordé par Abdoul Bocar était arrivé à son terme.
Almamy Hamady Saada acquiesça et lui offrit des cadeaux en abondance, or, argent massif, bœufs, moutons, chevaux…puis il lui demanda de venir dire aurevoir à sa famille dans ses appartements privés. Il avait 3 épouses, chacune habitait dans ses propres appartements avec ses enfants. L’Almamy appela chacune à venir saluer et dire aurevoir à son hôte. La première épouse sortit avec ses enfants pour saluer Bocar Hamjatou, ce dernier remarqua tout de suite la belle jeune fille aînée de l’Almamy Djiba Hamady Saada. Et il pensa immédiatement à son chef Abdoul Bocar, se disant qu’elle serait une épouse idéale pour lui. Puis ils passèrent saluer la 2ème et la 3ème épouses et leurs enfants. Le lendemain Bocar Hamjatou prit le chemin du retour. Almamy Hamady Saada le fit accompagner de plusieurs de ses gens pour protéger le bétail qu’il lui avait offert. Le groupe fit route vers Dabia. Après plusieurs jours ils arrivèrent aux environs de Dabia. Bocar fit halte en dehors de la ville et envoya chercher Abdoul Bocar. Quand ce dernier arriva, il lui présenta tous les cadeaux offerts par son hôte, lui raconta son séjour et toute l’hospitalité du roi du Bundu. Puis il dit à Abdoul Bocar de se servir, de prendre tout ce qu’il voulait de l’or, de l’argent, du bétail, des chevaux offerts par son alter ego. Abdoul Bocar refusa catégoriquement arguant qu’à travers Bocar, c’est lui-même que Almamy Hamady Saada avait ainsi honoré. Bocar lui fit alors la confidence sur la fille de l’Almamy. Il lui dit à quel point il rêvait qu’Abdoul Bocar la prenne pour épouse. Ce dernier lui répliqua que ce n’était pas possible, vu qu’il ne l’avait pas vue, qu’elle était loin et que ce n’était vraiment pas dans ses projets. Le maabo insista : « si tu ne l’as pas vue, moi je l’ai vue, c’est la femme qu’il te faut ». Plus Abdoul refusait, plus son compagnon insistait pendant des jours. Abdoul Bocar finit par céder. Bocar Hamjatou lui conseilla alors de le renvoyer au Bundu avec des hommes valeureux pour aller demander la main de la princesse.
Ce qui fut fait, le lendemain le groupe reprit le chemin du Bundu. Une fois arrivés, après quelques jours, tout le monde se demanda ce qui ramenait Bocar Hamjatou de sitôt ! Avec son groupe, il fut à nouveau bien accueilli par Almamy Hamady Saada. Ils furent hébergés, se reposèrent, se restaurèrent, puis furent admis auprès de leur hôte. Après les salutations d’usage et les voeux de bienvenue, Bocar demanda après Djiba Hamady Saada, disant qu’il voulait la voir. Le père envoya immédiatement chercher sa fille. Après l’avoir longuement saluée, Bocar transmit à Djiba les salutations de Abdoul Bocar et lui remit une petite bourse contenant 100 grs d’or, lui disant que c’était un cadeau de son roi à elle. Cette dernière prit la bourse, sans l’ouvrir et rendit les salutations.
La Princesse Djiba Hamady Saada prit la bourse, rendit les salutations, remercia Abdoul Bocar puis, rendant la bourse à Bocar Hamjatou, dit : « merci beaucoup, dites à Abdoul Bocar que je suis très honorée. Je te donne à toi Bocar et ta suite ces 100grs d’or. Tu sais, ici chez mon père, je suis comblée, je ne manque de rien, absolument rien. Soyez les bienvenus ». Puis elle se retira.
Après son départ Almamy Hamady Saada et ses hôtes restèrent silencieux quelques instants. Puis Bocar lui dit : « sais-tu ce qui nous amène ?» « non » répondit l’Almamy, « c’est Abdoul Bocar qui nous envoie pour te demander la main de ta fille Djiba ». Après un long silence, l’Almamy dit « Bocar, je ne peux pas donner à Abdoul la main de ma fille » « ah oui ? Et pourquoi ? » « je ne peux pas c’est tout, je ne peux pas donner à Abdoul Bocar la main de ma fille ». Malgré toute leur insistance, l’Almamy leur répétait la même chose. Ils durent se rendre à l’évidence et rentrèrent à Dabia bredouilles.
Quelques jours plus, Bocar, accompagné cette fois de grands dignitaires et de marabouts triés sur le volet, retourna une fois de plus au Bundu pour la même requête. Ils furent encore une fois bien accueillis, bien logés et nourris. Une fois reçus par leur hôte, Bocar formula encore la même requête. Il se vit opposé le même refus catégorique. Alors les dignitaires entrèrent en jeu et dirent à l’Almamy : « on ne peut pas se contenter d’un refus sec, tu dois au moins nous donner tes arguments et nous expliquer pourquoi ce refus ». Alors l’Almamy répondit : « Abdoul Bocar est faible, car le Fouta est maintenant divisé en petites provinces. Si cette demande m’était faite avant, quand le Fouta était uni et fort, je n’y aurais vu aucun inconvénient, mais maintenant Abdoul n’a plus cette force avec lui et je crains en lui donnant ma fille, qu’elle court le risque d’être enlevée par un quelconque chef de guerre qui attaquerait Abdoul Bocar, c’est la seule raison de mon refus ».
Le groupe fut obligé de se contenter de cette explication et retourna à Dabia. Une fois arrivés, ils firent la commission à Abdoul Bocar Kane. Ce dernier fit venir Bocar Hamjatou en aparté et lui dit « laissons tomber cette histoire de Djiba, ce n’est pas la peine » Bocar accepta cette décision de son chef à contrecœur, mais sans vraiment renoncer à ce projet. Un incident allait survenir et l’aider dans son rêve de ramener la Princesse du Bundu à Dabia. L’armée d’Abdoul Bocar se composait de plusieurs alliés, peulhs ou maures chacun dans son fief. Mais dès qu’il avait besoin d’eux tous se retrouvaient à Dabia. Le maure Sidy Amel en faisait partie. Chef de Namari Bakkar, il y habitait avec son jeune frère Cheikh Amel. Comme d’habitude chez les maures, ils avaient une esclave bonne à tout faire. Cette dernière, un jour, lasse de la charge de travail et des coups reçus, prit la fuite en direction de Jowul. Elle alla se réfugier chez Farba Jowul et son frère Hamet Galé tous deux lieutenants d’Abdoul Bocar. Elle fut bien reçue et en profita pour bien se reposer et manger à sa faim, tandis que ses maîtres la cherchaient partout pendant 2 mois. Un jour, Cheikh Amel alla rendre visite à son ami Hamet Galé, le frère de Farba Jowul. Alors qu’il était en plein conversation avec son hôte, il aperçut l’esclave et s’écria : « mais c’est notre esclave ça, que fais-tu là ? On t’a cherchée partout » il l’appela et la roua de coups, pendant que son hôte essayait de s’interposer. Cheikh protesta que cette esclave leur appartenait et qu’elle s’était enfuie, Hamet lui dit qu’il comprenait mais qu’il ne permettait plus qu’il lève la main sur elle. Alors le maure lui dit : « mais si, je vais la battre parce que c’est une esclave, tout comme toi d’ailleurs, car tout noir est esclave ». Hamet ivre de colère se rua sur lui et une rude bagarre éclata entre eux. Cheikh Amel blessé à la tête enfourcha son cheval et retourna à Namari Bakkar dans un piteux état. Horrifié, son frère le pressa de lui dire ce qui lui était arrivé et il lui raconta tout ce qui s’était passé à Jowul.
Alors son frère Sidy Amel lui dit : « allons immédiatement à Dabia nous plaindre à Abdoul Bocar ». Il enfourcha son cheval suivi de son frère et de plusieurs de ses hommes. Arrivé à Dabia Sidy Amel raconta à Abdoul Bocar ce que Hamet Galé avait fait à son frère, et lui dit que la seule solution pour éviter une confrontation entre Namari Bakkar et Jowul, était qu’Abdoul Bocar fasse venir Hamet Galé, et qu’on lui inflige le même traitement en guise de vengeance. Abdoul Bocar envoya chercher Farba Jowul et son frère. Farba comprit tout de suite la gravité de la situation et demanda à Hamet Galé de se mettre à cheval, alors toute la bande de Farba Jowul se leva comme un seul homme et décida de les accompagner à Dabia. Une fois sur place, les deux groupes se firent face. Tous étaient prêts à en découdre avec les autres. Abdoul Bocar assis entre les deux groupes était embarrassé. S’il donnait tort aux uns il perdait les autres et vice versa. Il les regardait à tour de rôle gardant le silence. Alors Bocar Hamjatou qui avait compris son embarras se leva, alla dans une pièce à côté et appela 2 compagnons d’Abdoul Bocar le diawando Sawa Coumboly et le maabo Ousmane Siré Léwa et leur demanda ce qu’ils pensaient de la situation. Ils répondirent que la situation était grave. Après un bref échange, ils appelèrent Abdoul Bocar et lui demandèrent de ne pas intervenir et de les laisser gérer la situation, car Abdoul ne pouvait se passer ni des uns, ni des autres dans son armée. Abdoul, soulagé reconnut son embarras et accepta de les laisser faire. Une fois retournés dehors, tous se rassirent sauf Bocar Hamjatou qui prit la parole et dit : « Cheikh Amel, tu es mal élevé et toi aussi Hamet Galé tu es mal élevé. Sinon vous ne poseriez pas de tels actes propices à nous séparer, alors que nous formons depuis longtemps un groupe uni qui impose le respect à tous nos adversaires. Ce que vous souhaitez c’est la scission, mais nous n’allons pas vous suivre dans cette voie. Nous avons assez d’un gros souci qui n’est pas vos petites batailles mesquines sans queue ni tête. Si vous êtes aussi courageux, allez enlever la Princesse Djiba Hamady Saada au Bundu. Ça c’est du costaud mais vous n’êtes pas assez courageux pour ça ». C’est le mot qu’il ne fallait pas prononcer. Hamet Galé dit : « Quoi ? Moi Hamet Galé pas courageux ? Je prendrai quelques hommes avec moi et j’irai enlever Djiba Hamady Saada. Vous allez voir ! » à cela son adversaire Cheikh Amel répliqua la même chose. Les deux grands frères dirent qu’ils ne laisseront jamais leurs jeunes frères partir seuls, ainsi de suite pour tous les autres hommes chacun disant qu’il était prêt à partir jusqu’à ce que toute la grande armée d’Abdoul Bocar au complet se dise prête à partir à Sendebou capitale du Bundu dans le but d’enlever la Princesse Djiba Hamady Saada et la ramener à Abdoul Bocar Kane à Dabia.
L’armée se mit en route forte de 400 personnes. A mi-chemin du Bundu, la troupe fit halte sur les hauteurs de Ndiya, ils y passèrent la nuit et se mirent à affuter leur stratégie. La situation était la suivante : Almamy Saada avait une armée forte de 800 personnes, les 400 à Sendebou et les 400 autres éparpillés dans les villages environnants, entre Bélé, Bantanané, Ndiya et Goudiry. Chaque fois que Sendebou était attaqué, les autres rappliquaient pour prêter main forte. Les bosseabés firent le plan suivant : une quarantaine de personnes irait attaquer chaque village, empêchant les renforts de sortir du village. Une fois l’attaque lancée, il faudra tout faire pour brûler le village, ce qui aura pour effet d’occuper les hommes à sauver leur maison et leur famille plutôt que d’aller secourir Sendebou ; tandis que le gros de la troupe irait attaquer directement Sendebou. Une fois que les villageois seront occupés à éteindre le feu de leurs concessions, leurs attaquants rappliqueront sur Sendebou pour aider les autres à mieux faire face aux 400 hommes de Almamy Hamady Saada. Ce qui fut fait. Et les choses se passèrent comme prévu. L’attaque fut lancée contre Sendebou, les villages alliés alertés, se préparèrent à aller prêter main forte et furent stoppés par les groupuscules armés. Ils durent rebrousser chemin en apercevant leurs maisons en feu.
La bataille faisait rage à Sendebou. Au milieu de la matinée, Farba Jowoul, le Beess (commandant) de l’armée décida d’entrer dans la maison de l’Almamy. Ce dernier, malgré ses vives protestations et sa résistance, avait été exfiltré de force par sa garde rapprochée, qui était sûre que c’était après l’Almamy qu’on en voulait. Farba Jowoul, Farmbal Julde et Sidy Amel pénétrèrent dans l’enceinte de la maison de l’Almamy. Farba Jowul pointa son arme sur quelqu’un qui s’enfuyait et lui demanda où se trouvait la princesse Djiba Hamady Saada. Ce dernier lui indiqua la pièce où se trouvait la jeune fille, Farba Jowul la tira dehors, la jeta sur la croupe du cheval de Farmbal Julde et, ce dernier, se servant de son turban, attacha la jeune fille à sa taille et lança son cheval au galop, suivi des deux autres. Ils sortirent de la ville. Sidy Amel visait et tirait sur les poursuivants, atteignant sa cible à tous les coups. L’armée de Abdoul Bocar se retira laissant sur place plusieurs morts et blessés des deux camps. Les poursuivants incapables de rattraper la Princesse, rebroussèrent chemin. La princesse fut amenée à Dabia et le reste de l’armée mit plusieurs jours à rentrer, hommes et chevaux souvent en piteux état.
La Princesse Djiba hors d’elle, refusa de s’alimenter. Elle décida d’observer une grève de la faim. On l’obligeait à manger par la force, en lui pinçant le nez jusqu’à ce qu’elle ouvre la bouche et on y mettait de la bouillie ou de l’eau. Abdoul Bocar n’était pas fier de cette situation. Une partie de ses hommes était restée sur le champ de bataille, il ne pouvait pas s’approcher de la jeune fille qui le détestait. Pire il s’inquiétait de sa grève de faim, craignant qu’elle ne meure entre ses mains. Il décida d’envoyer des hommes au Bundu redemander la main de Djiba.
Ils furent reçus par un Almamy furax qui exigea le retour immédiat de sa fille. Non seulement il refusait d’accorder la main de sa fille à Abdoul mais aussi il l’avertissait qu’il se vengerait cruellement de l’attaque subie et de la mort de ses hommes. Deux jours durant les messagers d’Abdoul Bocar prièrent Almamy de revenir à de meilleurs sentiments, mais ce dernier leur opposait un refus catégorique. Ils promirent alors de lui ramener sa fille, mais trouvèrent une ruse. Ils dirent à Almamy de réclamer à Abdoul Bocar une quantité de biens dont il ne pourrait pas s’acquitter. S’il y arrivait alors Almamy accepterait de lui donner sa fille, autrement Djiba rentrerait immédiatement au Bundu. Almamy réfléchit un moment puis accepta. Il imagina ce qui, d’après lui serait de très loin hors de portée d’Abdoul Bocar en termes de bétail, produits agricoles, or, argent etc… et dit aux bosseabés de lui transmettre ses exigences…
Les émissaires d’Abdoul Bocar rentrèrent à Dabia et délivrèrent le message de l’Almamy. Abdoul dit tout de suite : « je suis d’accord », alors que ses hommes pensaient que c’était vraiment trop. Il leur demanda alors de retourner chez l’Almamy, de lui rapporter 1/3 des biens qu’il lui réclamait et de lui dire que le 2ème tiers lui parviendra dans 6 mois et le dernier tiers dans 1 an. L’Almamy surpris qu’Abdoul Bocar ait pu rassembler tout ça en peu de temps décida finalement de lui accorder la main de sa fille. Mieux, il demanda à son fils aîné de repartir avec les émissaires, de dire à sa sœur qu’il avait accepté de la donner en mariage à Abdoul et qu’il lui demandait d’accepter d’être son épouse et de mettre fin à sa grève de la faim, il lui disait aussi qu’il était fier d’elle et qu’elle l’avait honoré.
Le frère fit exactement ce que son père l’Almamy du Bundu lui avait dit, et Djiba mit fin à sa grève de la faim et accepta Abdoul Bocar comme époux. Le frère séjourna quelques jours à Dabia avant de s’en retourner au Bundu. Six mois après, tenant sa promesse, Abdoul Bocar envoya à l’Almamy l’autre tiers des biens promis. Peu avant la dernière échéance, Abdoul Bocar apprit que son beau-père l’Almamy était en difficulté. En effet, Almamy Hamady Saada, soumettait les peulhs ulunkés (vers Kédougou) et nianinkés (du côté de Kolda) à divers sévices. Ces derniers se préparèrent et attaquèrent l’Almamy et ses hommes à Sendebou, ils enlevèrent des enfants et firent main basse sur tout le bétail. Almamy Hamady Saada était malheureux mais trop faible pour se lancer dans une confrontation avec ces peulhs. Quand Abdoul Bocar apprit ce qui lui était arrivé, il leva son armée pour aller secourir son désormais beau-père. Arrivé à Sendebou, il demanda à l’Almamy ce qui s’était passé, ce dernier lui raconta tout. Abdoul lui dit alors : « nous irons combattre ces peulhs et te ramener tes biens et tous les enfants enlevés ». L’Almamy mit à sa disposition ses hommes mais Abdoul déclina l’offre, lui disant qu’ils iraient seuls au combat, ses hommes et lui. Après s’être préparés ils mirent cap sur Uul et Niany. Trois jours durant, la bataille fit rage entre les bosséabés et les peulhs. Abdoul et ses hommes remportèrent la victoire et en plus de récupérer tous les biens et enfants enlevés, ils firent à leur tour main basse sur tous les biens et enfants des ulunkés et des nianinkés qu’ils trouvaient. De retour à Sendebou, Abdoul Bocar dit à l’Almamy : « voilà tes biens et tes enfants, voilà leurs biens et leurs enfants, tout est à ta disposition et ils n’oseront plus t’attaquer ». Avant de quitter Sendebou, il rappela à Almamy Saada sa promesse de lui verser le dernier tiers des biens promis pour la main de sa fille, comme convenu. L’Almamy lui dit qu’il n’en était plus question parce que ce que Abdoul Bocar et son armée avaient fait pour eux valait plus que ça. Les bosséabés s’en retournèrent alors tranquillement chez eux.
Par contre chaque fois que l’occasion se présentait, Bocar Hamjatou ne manquait pas de taquiner la Princesse Djiba en lui disant : « alors, n’est ce pas que ton père nous avait minimisés, il disait qu’on était faibles et que si Abdoul Bocar t’épousait, on pourrait l’attaquer et t’enlever, et maintenant, qui l’a sauvé ? N’est-ce pas nous ? Il a compris qu’on était loin d’être faibles n’est-ce-pas ? » Et Djiba se mettait à rire.

